Marcel Carné enchaîne les projets, se voyant proposer de nombreuses adaptations… « À ceux qui s’étonneraient de cet éclectisme, je répondrai qu’il fut un temps où, balloté de producteurs en producteurs, tous déboussolés par le succès, momentané, de ce que François Giroud appelait la Nouvelle Vague, je flottais quelque peu… Il ne faudrait cependant pas que cette diversité des genres laisse croire, comme on m’en avait accusé, que "j’abdiquais"… » (Marcel Carné, La Vie à belles dents).
Cette adaptation du roman de Simenon est avant tout le projet du producteur Charles Lumbroso, qu’il avait d’ailleurs préalablement proposé à Jean-Pierre Melville. Ne voulant pas trahir l’esprit du roman, Carné décide de se contenter des événements du livre, de ne rien ajouter, au risque, de son propre aveu « de faire un film assez creux, peut-être même ennuyeux » – c’est d'ailleurs ce qui lui sera reproché. Film sur l’incommunicabilité des êtres, Trois chambres à Manhattan est un drame intérieur, le portrait de personnages fatigués, en plein désarroi, qui s’accrochent l’un à l’autre pour échapper à leurs solitudes respectives. Il est aussi un film de genre qui contraste avec le reste de la filmographie de Carné, et une formidable leçon de cinéma soutenue par les éclairages somptueux d'Eugen Schüfftan.
Marcel Carné imaginait peut-être tourner dans les rues et immeubles de New York, mais la production n’en a pas les moyens. Peu de scènes seront estampillées made in USA, et la plus grande partie du film sera mise en boîte dans la banlieue parisienne. Pour Carné, il manquera toujours à son film l’atmosphère qu’il avait respirée lors de ses repérages.
Trois chambres à Manhattan est choisi pour représenter la France au Festival de Venise. La projection de presse est absolument désastreuse, Carné parlera plus tard de « cabale » contre lui : lui ferait-on payer les propos qu’il a tenu sur la Nouvelle Vague ? Le public, lui, fera un bien meilleur accueil au film, et Annie Girardot recevra même le prix d’interprétation à Venise. « Elle a voulu être Kay et elle est Kay. Depuis les grandes interprétations d’Emmanuelle Riva, j’ai rarement vu une comédienne s’identifier aussi exactement à un personnage. » (Georges Charensol, Les Nouvelles littéraires, 18 novembre 1965)
Trois chambres à Manhattan
France, 1965, 1h48, noir et blanc, format 1.37
Réalisation : Marcel Carné
Scénario : Marcel Carné, Jacques Sigurd, d’après le roman Trois chambres à Manhattan de Georges Simenon
Dialogues : Jacques Sigurd
Photo : Eugen Schüfftan
Musique : Martial Solal, Mal Waldron
Montage : Henri Rust
Décors : Léon Barsacq
Costumes : Antoine Mayo
Production : Les Productions Montaigne
Interprètes : Annie Girardot (Kay), Maurice Ronet (François Combes), O.E. Hasse (Hourvitch), Geneviève Page (Yolande Combes), Gabriele Ferzetti (le comte Larsi), Roland Lesaffre (Pierre), Margaret Nolan (June), Virginia Vee (la chanteuse), Robert De Niro (un client du restaurant)
Sortie en France : 10 novembre 1965
FILM RESTAURÉ
Remerciements à Gaumont Distribution
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