Qiu Ju, une femme chinoise

Cinquième film de Zhang Yimou, cinéaste chinois de la « cinquième génération » – celle de l’après-Révolution cultu-
relle –, Qiu Ju, une femme chinoise se déroule dans la Chine contemporaine, une première pour son auteur. Pour ce portrait de femme, Zhang Yimou délaisse les étoffes orientales et les recherches chromatiques, et pose sa caméra dans la campagne chinoise. Victime de la Révolution culturelle, le cinéaste avait été lui-même condamné à travailler la terre, afin de suivre une « rééducation idéologique ». Ce milieu, il le connaît donc bien. Il décide alors de filmer les gestes quotidiens à « hauteur d’homme ». Seuls quatre personnages sont interprétés par des comédiens professionnels, tous les autres sont des paysans, et près de la moitié du film est filmée avec une caméra dissimulée. Afin de donner à cette fiction une valeur documentaire, Zhang Yimou a également demandé à ses acteurs de s’immerger deux mois au sein de la communauté, de porter leurs costumes, de répéter leurs gestes… 

Combat d’une femme simple mais déterminée, pour qui l’honneur n’a pas de prix, interprétée par une Gong Li métamorphosée, Qiu Ju est une chronique de la Chine contemporaine : les rouages de la bureaucratie chinoise, la délation, l’entraide villageoise… Vu d’Occident, le film est proche du drame, œuvre sociale et engagée, réflexion sur la loi, la justice, la vengeance. Mais il a beaucoup fait rire des millions de spectateurs chinois, regardant comme une comédie les aventures de cette paysanne face à la bureaucratie.

Qiu Ju, une femme chinoise sera récompensé par de nombreux prix dont le Lion d’or et le prix d’interprétation féminine pour Gong Li à la Mostra de Venise. Il sera par ailleurs qualifié de « gloire de la nation chinoise » par les autorités du pays... Celles-là mêmes qui avaient censuré les précédents films de Zhang Yimou, artiste dissident.