Premier cinéaste entré à l’Académie française, en 1946, Marcel Pagnol s’est souvent heurté au mépris de la critique, qui lui reprochait de faire du théâtre à l’écran. Après avoir confié à d’autres réalisateurs l’adaptation de ses pièces, il est lui-même passé derrière la caméra en 1933, en endossant le rôle de producteur, scénariste et dialoguiste de tous ses films.
En 1938, il emprunte à Jean Giono l’histoire du boulanger et de sa jolie femme en fugue. De cette nouvelle d’une quinzaine de pages, Pagnol tire ce qu’Orson Welles nommera « un film parfait ».
Si le réalisateur s’intéressait peu à la forme, il n’avait pas son égal pour faire parler ses acteurs. Pagnol, convaincu par le cinéma parlant, avait entrevu – bien avant d’autres – les possibilités immenses qu’il offrait. « Pagnol heureusement, était là, armé de son accent de Marseille, de son comique sain et direct, de sa sensibilité populaire, de sa poésie et de sa truculence. Il mit la main à la caméra. Et le public apprit à ne pas mépriser la parole » déclare son ami Henri Jeanson (Cinémonde n° 476, 1er décembre 1937).
Cinéaste du parlant, Pagnol frappe par son sens du dialogue, par la simplicité de sa langue et par sa poésie franche. C’est Raimu, désarmant de tendresse, qui endosse le rôle du boulanger trompé. Face à la formidable présence de son acteur fétiche, volubile et tonitruant, Pagnol oppose Ginette Leclerc, en jolie infidèle, silencieuse et contrite. Avec ce touchant conte moral, le cinéaste met en scène la vie dans ce qu’elle a de plus humble et de sincère. La Femme du boulanger, c’est le triomphe du réalisme régional, l’éloge de la poésie quotidienne. Le pain blanc dont le village est privé, voilà le modeste prétexte qui réunit cette communauté en émoi. La postérité retiendra longtemps la superbe scène finale, dans laquelle Aimable adresse à la Pomponnette, sa chatte, un monologue crève-cœur, pour mieux dire sa douleur à son Aurélie, revenue de sa fugue.
La Femme du boulanger
France, 1938, 2h13, noir et blanc, format 1.37
Réalisation & Scénario : Marcel Pagnol, d’après un épisode du roman Jean le Bleu de Jean Giono
Photo : Georges Benoît, Roger Ledru
Musique : Vincent Scotto
Montage : Suzanne de Troye, Marguerite Renoir, Suzanne Cabon
Production : Marcel Pagnol, Les films Marcel Pagnol
Interprètes : Raimu (Aimable Castanier), Ginette Leclerc (Aurélie Castanier), Fernand Charpin (le marquis Castan de Venelles), Robert Vattier (le curé), Charles Blavette (Antonin), Robert Bassac (l'instituteur), Marcel Maupi (Barnabé), Alida Rouffe (Céleste, la bonne), Odette Roger (Miette), Yvette Fournier (Hermine), Maximilienne (Angèle), Charblay (Arsène, le boucher), Julien Maffre (Pétugue), Adrien Legros (Barthelemy)
Sortie en France : 7 septembre 1938
Ressortie en salle en décembre 2016
FILM RESTAURÉ
Remerciements à Mission
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