La Chamade

Adapté du roman à succès de Françoise Sagan, qui en cosigna le scénario, La Chamade est le quatrième film d’Alain Cavalier et sa première incursion dans un classicisme qui le surprendra lui-même lors du tournage, éclatant d'un rire tonitruant face aux situations qu’il filmait. Tourné entre avril et juillet 1968, La Chamade est le portrait d’une femme contemporaine, libre d’aimer qui elle veut, de faire ses choix, de les assumer. Mais Lucile ne sait quel bonheur choisir, qui préférer entre l’amant quadragénaire, riche et raffiné, et le plus jeune, éditeur ne roulant pas sur l’or. Son cœur bat la chamade pour le second, mais jeune et excessif, il exige d’elle qu’elle rompe avec son Pygmalion et qu’elle accepte de travailler. Le premier, lui, l’aime comme elle est.

Fidèle au roman de Françoise Sagan, La Chamade pose un regard cruel et lucide sur les faux-semblants de ce monde vain et clos. Le film bénéficie des talents de directeur de la photo de Pierre Lhomme et d’une mise en scène toute en retenue.

Sorti à la rentrée 1968, après les "événements", le film ne rencontre pas le succès escompté, et se voit reprocher de ne parler que des futiles problèmes d’un milieu aisé. Cavalier, réalisateur jusque-là politique (Le Combat dans l’île en 1962 et L’Insoumis en 1964), surprend. Il ne repassera derrière la caméra que huit ans plus tard.

Pourtant le portrait de Lucile, personnage bercé entre ivresse de liberté et penchant pour l’indolence, est saisissant. Et le talent de Catherine Deneuve, largement souligné par une critique sous le charme. « Les émotions passent sur son visage comme les reflets du ciel sur la mer : sous les chatoiements irisés de la lumière, le mystère garde son opacité. Nulle ne sait mieux qu’elle exprimer cette légèreté des choses profondes qui caractérise aussi bien l’œuvre de Sagan qu’une forme très moderne de la morale. »  
(Pierre Billard, L’Express, 4 novembre 1968)