Nous nous sommes tant aimés

Dédié à la mémoire de son grand ami Vittorio De Sica, Ettore Scola signe avec Nous nous sommes tant aimés ! un vibrant hommage au cinéma italien. Une fresque tendre sur les illusions perdues et le temps qui passe, aujourd’hui considérée comme un chef-d’œuvre. Drame de la jalousie (1970) avait fait découvrir Scola au public français, ce film le révèle comme un grand cinéaste. Dans cette chronique d’après-guerre, les destins des trois protagonistes se croisent pour brosser le portrait doux-amer d’une génération qui s’est battue pour ses idéaux. Entre 1945 et 1972, le film traverse une Italie désenchantée, enlisée dans le système politique de la démocratie chrétienne. « Nous pensions changer le monde et c’est le monde qui nous a changés » conclut tristement Nicola à la fin du film. 

C’est ce constat mélancolique qui traverse Nous nous sommes tant aimés !, de sa genèse à sa version définitive. À l’origine, confie Scola, Vittorio De Sica était au cœur même du projet. Le film devait raconter l’histoire d’un professeur de province qui, profondément troublé par Le Voleur de bicyclette et obsédé par le cinéaste, abandonnait travail et famille pour se lancer dans une filature longue de trente ans. 

De Sica meurt en novembre 1974, avant la sortie du film, mais il a eu le temps de le voir. Il y apparaît, dans son propre rôle, lors d’une précieuse séquence d’archives qui le montre racontant à une foule d’enfants comment il est parvenu à faire pleurer le petit garçon dans Le Voleur de bicyclette.

« Avec le recul, Nous nous sommes tant aimés ! constitue un des portraits les plus lucides qu’ait donné le cinéma italien de l’évolution du pays, une de ces œuvres prémonitoires qui portent en germes les impasses de l’avenir. » (Jean A. Gili, Le Cinéma italien, éd. de La Martinière)