Christophe
l'invité mystère


Posté le 11.10.2016 à 11H


 

 MG 3909

© Institut Lumière / Photo Léa Rener

 

Cela se passe dans un de ces espaces mutants tout entiers orientés vers le troisième millénaire, moitié centre commercial / moitié centre culturel. Enfin, sachons mesure garder, disons qu’il y a aussi un complexe cinématographique, superbe au demeurant. Et qui déboule là-dedans, peu avant vingt heures, au titre d’invité surprise du ciné-club de Télérama ? Pour une surprise c’est une surprise ; même si…

Soudain le nabot viscontien à profil d’aigle et lunettes fumées entre en scène. Comme toujours il ne sort qu’à la nuit ; comme un gardien du temple, un receleur de trésors. Un jour que Fellini est à Paris et qu’il veut organiser une projection de La Strada en V.O sous-titrée, Langlois lui précise que la seule copie disponible dans capitale est entre les mains de Daniel Bevilacqua dit Christophe. Christophe ? Quoi le chanteur à minettes, l’homme d’Aline et des Marionnettes serait donc cinéphile ? Et oui, et pas qu’un peu ! C’est même un type qui, à l’époque, se la joue, lui aussi « dragon veillant sur ses trésors », le cul posé sur des dizaines de boites de bobines de super 8, 16 et 35 millimètres. Souvent, il organise chez lui des projections pour les amis, chérissant en irrémédiable fétichiste le déroulement du celluloïd entre ses doigts gantés…

Voilà ce qu’il raconte ce soir sur la scène de l’UGC-Ciné-Cité Confluence, assis en tailleur sur un fauteuil rouge. On apprend aussi que c’est durant les entractes du CINEVOG de Juvisy-sur-Orge qu’il entame sa carrière de chanteur de blues. A quatorze ans. D’un débit confidentiel et sur le mode « modianesque », fait d’ellipses contrôlées et de sauts syntaxiques restés en suspend, il multiplie les coqs à l’âne et les anecdotes bravaches puis nous propose trois extraits de documentaires singuliers et poétiques à son image. Lutin lunaire, difracteur de mélodies, pourvoyeur de sons, initiateur de cut-up farceurs. Rital parnassien hors norme à jamais qui a inscrit au programme de sa carte blanche, comme ses nuits, Cape Fear de Jacky Thomson, 1962, avec Robert Mitchum et Gregory Peck.

Christophe, si petit et si grand, BIGGER THAN LIFE ! Respect.

 

Pierre Collier

Catégories : Lecture Zen